Une ASBL peut-elle posséder aujourd’hui des actions dans une société commerciale ? Et quid pour l’avenir ?

Analyse Même après la modernisation des codes de base du droit belge, une ASBL pourra détenir des participations dans une société commerciale à condition que certains principes généraux soient respectés.

1. Selon le droit actuel

Malgré une certaine réticence vis-à-vis de la détention, par une ASBL, d’une participation dans une société commerciale, cela est aujourd’hui possible à condition que certains principes généraux soient respectés.

  1. Une ASBL ne peut détenir des actions que dans une société à responsabilité limitée.  L’ASBL ne peut pas être actionnaire d’une société à responsabilité illimitée, puisque dans ce cas, elle acquerrait la qualité de commerçant, ce qui est fondamentalement contraire au statut d’une ASBL.
  2. Les statuts de l’ASBL doivent permettre la participation dans une société commerciale.
  3. Seul l’organe compétent au sein de l’ASBL peut prendre une décision sur l’acquisition, la détention ou le rejet ou non de pareille participation. A défaut de mention à cet égard dans les statuts, la compétence revient au conseil d’administration. En fonction de l’importance de la participation, une concertation avec l’assemblée générale peut être indiquée.
  4. La participation dans une société commerciale  doit pouvoir s’inscrire dans le cadre de la réalisation du but de l’ASBL. Les éventuelles distributions qui sont reçues du chef de cette participation (par exemple les dividendes) doivent rester au sein de l’ASBL et être utilisées pour la réalisation de son objet statutaire.  Les participations purement spéculatives ne sont pas autorisées. Si l’ASBL réalise un bénéfice et distribue celui-ci parmi ses membres, elle peut être qualifiée de société de droit commun, dont les membres sont solidairement responsables des dettes de l’ASBL, même en cas de sortie (jusqu’à 5 ans).
  5. Un point plus délicat est la question de savoir si une ASBL peut prendre une participation majoritaire dans une société commerciale. Pour ne pas courir de risque, il est recommandé de se contenter d’une participation minoritaire.  Lorsqu’une ASBL détient une participation de contrôle qui s’inscrit complètement dans la ligne de l’activité statutaire de l’ASBL, nous n’y voyons pas d’objections fondamentales. Une ASBL qui assure la gestion d’une société par le biais d’une participation de contrôle n’accomplit pas encore des actes qui ne rentrent pas dans la description de son objet. C’est et cela reste la société dans laquelle l’ASBL détient une participation de contrôle qui déploie des activités commerciales.
  6. Il est difficilement justifiable qu’une ASBL investisse la majeure partie de son patrimoine dans une ou plusieurs participations dans des sociétés.  Une société commerciale peut faire faillite, ce qui, eu égard aux conditions données, pourrait être fatal pour l’ASBL en question.

2. Le droit futur – Réformes imminentes dans le droit des associations

En décembre 2016, le Ministre de la Justice Geens a présenté ses réformes prestigieuses dans « Le saut vers le droit de demain ». L’objectif consiste en la modernisation de tous les codes de base du droit belge. Le droit des personnes morales, le droit des sociétés et le droit des associations en font également partie.

Quelles sont les lignes de force des réformes jusqu’ici ?

Outre la simplification du nombre de formes de sociétés, le principe de base consiste dans le peaufinage des différents types de personnes morales.  Les modifications suivantes sont proposées :

  1. La distribution de bénéfices devient le critère distinctif entre sociétés et associations.  Le principe « sans but lucratif » disparaît et le principe « sans distribution de bénéfice » vient à la place comme la nouvelle et unique distinction entre association et société.La vie associative et les organisations du secteur non marchand ont ajouté entretemps, à cette interdiction de distribution de bénéfice, une modalité qui consiste à interdire la distribution de bénéfices à des membres ou à des tiers – qu’elle soit financière ou matérielle, directe ou indirecte – à moins que les membres ou les tiers fassent partie des bénéficiaires du but désintéressé de l’ASBL. Cet ajout a été accepté par le Ministre.
  2. La libéralisation du droit des associations, ou bien l’autorisation illimitée d’activités économiques pour les associations, mais en faveur de certains buts désintéressés (voir point 3 ci-dessous). La restriction à des activités économiquement secondaires disparaît.
  3. Outre l’interdiction de distribution de bénéfice, un deuxième critère positif est ajouté à la définition d’une ASBL : chaque ASBL doit avoir un ou plusieurs buts « désintéressés » définis.
  4. Les associations relèveront du droit sur les faillites moyennant certaines adaptations. Elles pourront donc également chercher une protection face aux créanciers.

3. Que signifieraient ces réformes pour la détention de participations par une ASBL dans une société commerciale ?

La réforme se trouve encore dans une phase préparatoire. Il n’y a donc pas encore de textes définitifs.

Sur la base des documents tels qu’ils existent maintenant, une ASBL pourra également, à l’avenir, détenir des participations dans une société commerciale.

Les principes de base repris sous les points 1 et 2 sont supprimés, sous réserve du principe de base 4.
Le principe de base n° 3 reste intégralement applicable.

Le principe de base n° 4 doit alors être lu dans ce sens qu’une participation dans une société commerciale doit servir un intérêt désintéressé, tel qu’il est défini dans les statuts de l’ASBL en question.  Les éventuelles distributions qui sont reçues du chef de cette participation (par exemple dividendes) doivent rester au sein de l’ASBL et être utilisées pour la réalisation de ses buts désintéressés, à moins que ce « bénéfice » ne soit distribué à des membres ou à des tiers, pour autant que cela s’inscrive dans le cadre du but désintéressé de l’ASBL.  

Il en va de même pour le principe de base 5.  

Etant donné que les ASBL relèveront, tout comme les sociétés, du droit sur les faillites, le principe général 6 devient un principe général qui est applicable à tout un chacun (personne physique ou personne morale, société et/ou association).

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Leo Peeters

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