Carnet de route concernant les fusions et acquisitions en Belgique (3° partie)

L'exécution en bonne et due forme du contrat et la clôture

Analyse Suite à la structuration du transfert d'entreprise et l'exécution de certains accords préliminaires (étape 1), la 'due diligence' et les négociations sur le contrat de vente et d'achat (étape 2), une troisième étape dans le contexte d'une opération de fusions et d'acquisitions privée sera entamée, notamment  l'exécution en bonne et due forme du contrat et la clôture.

1. La signature

Une fois que les négociations relatives au contrat de vente et d’achat sont finalisées, le contrat est exécuté en bonne et due forme lorsqu’il est signé par les signataires dûment autorisés des parties ou par les personnes agissant selon un mandat octroyé par lesdits signataires dûment autorisés. Les informations sur les signataires autorisés de personnes morales belges peuvent être obtenues auprès des registres publics. 

L’autorisation en bonne et due forme des signataires est normalement soutenue par les réunions du conseil d’administration qui approuvent tant les transactions que la capacité des signataires à souscrire le contrat.

Selon le droit belge, il n’existe pas d’exigences spécifiques pour l’exécution de documents par des parties non belges. Dans certains cas toutefois, les parties peuvent demander un exemplaire des statuts ou du règlement d’ordre intérieur de la société étrangère, de même qu’un extrait du registre du commerce pertinent confirmant l’autorité des signataires. En outre, la législation ou une apostille pourrait être requise pour l’utilisation de documents étrangers en Belgique. Par ailleurs, les parties exigent parfois un avis juridique confirmant la constitution et l’existence de la société étrangère, de même que la capacité des signataires des documents de transaction.

2. Entre signature et clôture dans le cas d’une approche en deux étapes

Comme indiqué dans les apports antérieurs à notre carnet de route sur les F&A (fusions et acquisitions), bien qu’il soit possible, en théorie, que la signature et la clôture aient lieu en même temps, la plupart des contrats suivent une approche en deux étapes : après la signature, un certain nombre de conditions suspensives doivent être remplies avant le paiement du prix d’achat et le transfert de propriété, qui constitue la clôture de la transaction.

Il est caractéristique que les obligations de l’une des parties ou des deux concernant la clôture (c’est-à-dire l’exécution de l’achat) dépendront de facteurs extérieurs (comme les approbations réglementaires) exigés pour que les parties puissent procéder à la transaction, de même que de préconditions économiques spécifiques à l’affaire (comme l’embauche de membres du personnel clés ou une restructuration). Les conditions suspensives (« CS ») devraient uniquement s’appliquer aux obligations de transfert de propriété des actions dans la (société) cible et le paiement du prix d’achat. D’autres obligations des parties ne devraient pas être soumises à des conditions (ceci comprenant en particulier les conventions pertinentes entre la signature et la clôture). Dans le cas contraire, aucune application desdites conventions ne pourrait être recherchée dans l’attente de l’application des conditions suspensives. Par conséquent, il n’y aurait aucun sens à faire en sorte que toutes les obligations des parties soient soumises aux CS.

3. Conditions suspensives (« CS »)

Si l’une des CS n’est pas remplie et qu’aucune des parties n’exerce son droit de renonciation à l’une quelconque des CS non remplies, la clôture n’aura pas lieu. Il est normal de prévoir, dans ces conditions, que le contrat sera soit résilié ou que l’une des parties a le droit d’option de résilier le contrat.

Il est recommandé de faire insérer une disposition dans le contrat indiquant que nonobstant le droit belge, la réalisation des CS n’a pas d’effet rétroactif. La neutralisation de cet effet (qui est autorisé selon le doit belge) fait correspondre une CS réalisée avec le fait que la vente/l’achat (et le transfert/paiement) ne deviendra effective (effectif) qu’à partir de la date de clôture de la transaction (et non à la date à laquelle les obligations ont été souscrites (c.-à-d. la date de signature).

Selon le droit belge, les CS dont la réalisation dépend entièrement de la volonté de la partie qui bénéficie de ladite CS sont nulles et non avenues. Une CS par laquelle le conseil d’administration du vendeur et/ou de l’acheteur devrait approuver la vente/l’acquisition doit être considérée comme telle. 

L’exemple typique d’une CS est l’obtention des approbations de concurrence nécessaires des autorités de la concurrence compétentes. La période entre la signature et la clôture correspond généralement au laps de temps octroyé aux autorités pour adopter une décision ou ne pas s’opposer concernant la transaction envisagée par le contrat. La mise en œuvre d’une transaction avant que ces approbations d’exécution aient été obtenues, est interdite et fait l’objet de pénalités. En principe, de tels avis de concentration sont de la responsabilité de l’acheteur, mais vont également nécessiter l’aide du vendeur. 

Parmi les autres CS courantes, on citera notamment l’obtention d’un financement bancaire conforme au marché et l’exécution d’autres documents liés à la transaction, comme les accords de direction. 

Pour les transferts d’actifs, une pratique ordinaire consiste à demander au vendeur de fournir notamment un certain nombre de certificats émis par certaines autorités fiscales et de sécurité sociale indiquant qu’aucun impôt ou taxe, ou obligation de sécurité sociale, n’est exigible dans le chef du vendeur.

4. Direction des affaires

Pendant la période intérimaire qui sépare la signature et la clôture, les parties se seront généralement mises d’accord sur une clause conservatrice impliquant qu’au cours de cette période, le vendeur est uniquement autorisé à diriger les affaires de la société selon le cours ordinaire des choses. Il sera exigé du vendeur qu’il préserve l’activité en tant qu’affaire qui marche. Certaines mesures seront expressément interdites comme les distributions de dividendes, les modifications des statuts, l’octroi de titres, l’endettement autre que dans le cours ordinaire des choses, etc. En outre, il sera requis du vendeur qu’il paie la totalité de l’endettement exigible dans le chef de la société avant la clôture. 

5. Ajustements du prix d’acquisition

Dans les transactions en deux étapes telles que décrites ci-dessus, une pratique ordinaire consiste à inclure un mécanisme d’ajustement du prix, suivant lequel le prix d’achat sera ajusté à la hausse ou à la baisse sur la base de certaines données financières (endettement net, trésorerie, etc.) à la clôture. Il est crucial que la procédure et les différents composants de ce mécanisme soient clairement définis dans le CVA. 

Des ajustements de prix après la clôture sont également possibles, mais dans la pratique belge, ils sont tout à fait exceptionnels étant donné que le vendeur souhaite connaître le montant définitif du prix lorsqu’il transfère les actions de la société cible à la clôture.

6. La clôture ('closing')

A la clôture, qui peut avoir lieu en relation avec la « signature » ou, comme indiqué ci-dessus, dans une transaction en deux étapes après l’exécution ou la renonciation des CS, la transaction est clôturée une fois que le prix d’achat est payé et que la propriété est transférée. 

Dans les transactions F&A privées belges, la forme prédominante de rémunération réside dans les espèces. Toutefois, un paiement en actions ou une combinaison d’actions et d’espèces est également utilisé(e).

Concernant un transfert d’actions, il n’existe pas d’exigences ni de formalités spécifiques. Le transfert de propriété doit être enregistré par les deux parties dans le registre des actions de la société. Selon le droit belge, un tel registre représente exclusivement une preuve de propriété. Toutefois, en cas de doute ou de contestation, d’autres moyens peuvent être recherchés par la suite pour prouver la propriété.

Concernant un transfert d’actifs, les parties doivent se conformer aux lois qui régissent les transferts d’actifs et l’applicabilité de transferts à l’égard des tiers pour tous les actifs transférés, y compris les contrats, sauf si les actifs et les passifs éventuels, sont transférés selon les articles 760 et suivants du Code belge des sociétés. 

Les parties conviennent généralement que certaines autres démarches seront exécutées à la clôture, par exemple la souscription de contrats outre le CVA comme un contrat de services transitoire et la démission des administrateurs de la société cible. 

Dans de nombreux cas, les administrateurs de la société cible sont également les actionnaires ou sont au moins liés à ces derniers. Il est escompté qu’ils démissionneront de leurs postes et seront remplacés par des administrateurs désignés par l’acheteur. Pour éviter qu’un acheteur utilise les règles relatives à la responsabilité des administrateurs pour réclamer une indemnité en dehors du CVA (et donc de circonvenir éventuellement certaines limites contractuelles), il est courant de convoquer une assemblée extraordinaire des actionnaires de la société à la date de clôture. Lors de cette assemblée, les thèmes suivants doivent être discutés et faire l’objet de résolutions :  

(i) la reconnaissance de la démission des administrateurs,

(ii) le décharge de responsabilité des administrateurs démissionnaires pour l’exécution de leur mandat jusqu’à la clôture (qui doit être confirmée par l’assemblée annuelle des actionnaires qui suit) et

(iii) la désignation de nouveaux administrateurs. 

Dans une approche en deux étapes, le CVA et les documents du conseil (d’administration) sont généralement signés au moment de la signature, tandis que le mémorandum de clôture, le registre des actions, les procès-verbaux et les contrats auxiliaires sont généralement signés au moment de la clôture. Lorsque les parties exécutent un mémorandum de clôture, elles confirment :

(i) la réalisation des CS éventuelles ;

(ii) le respect des conventions pertinentes entre la signature et la clôture ;

(iii) la mise en œuvre adéquate de toutes les mesures ou formalités de clôture (un achèvement partiel doit être évité dans tous les cas ; c’est pourquoi, l’importance d’une clôture « conditionnelle » devrait être soulignée) ; 

(iv) le transfert du titre et des risques sur les actions dans la société cible ;

(v) la confirmation de la réception du prix d’achat.

7. Des engagements postérieurs à la clôture

Un contrat d’achat comporte généralement aussi certaines conventions des parties qui ne viennent pas à expiration après la date de clôture. Certaines de ces conventions entrent en vigueur à la date du contrat d’achat et se prolongent après la date de clôture, alors que d’autres conventions ne sont applicables qu’à la date de la clôture seulement.

Ci-après certaines conventions qui ont lieu généralement dans les transactions belges.

7.1 Clauses 'Earn-Out'

Au cas où une partie du prix d’achat a été rendue dépendant de la performance de la société (cible) après la date de clôture (ce qu’il est convenu d’appeler une « clause d’indexation sur les bénéfices futurs »), il est courant que l’acheteur convienne essentiellement de diriger l’affaire vendue de la même façon qu’auparavant. En outre, certains mécanismes peuvent être mis en place pour garantir que le vendeur conserve les moyens pour surveiller certains développements, par exemple par des obligations de rapportage de l’acheteur.Pour plus d'information à ce sujet, cliquez ici.

7.2 Engagements du vendeur

Une pratique du marché consiste à ce que le vendeur convienne (i) de ne pas concurrencer la société ou l’activité vendue, (ii) de ne pas divulguer ou utiliser les informations confidentielles concernant l’activité acquise, (iii) de ne pas solliciter les membres du personnel, fournisseurs ou clients et (iv) de se mêler de quelque façon que ce soit de l’activité ou de porter atteinte à sa clientèle (good will). Comme indiqué ci-avant, l’acheteur bénéficiera, dans le cadre d’une transaction portant sur des actions, de la protection du droit civil, sauf, par exemple, les engagements en matière de confidentialité, qui doivent être mentionnés explicitement dans le contrat d’achat.

A la lumière des difficultés impliquées par la preuve de dommages résultant d’une rupture des engagements mentionnés ci-dessus (et en particulier, la restriction de non-concurrence et la confidentialité), il est conseillé de prévoir une indemnisation forfaitaire en cas d’infraction. 

7.3 Restriction concernant l’impôt sur les transferts et sur les plus-values

Dans les transactions où le vendeur est une personne physique, un impôt sur les plus-values de la vente d’actions appartenant à un actionnariat substantiel dans une société belge. Les contrats d’achat comprennent souvent l’engagement de l’acheteur à ne pas vendre ni transférer autrement les actions à tout tiers en dehors de l’Espace économique européen pendant une période de douze mois à partir de la clôture. 

 

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Alain De Jonge

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Leo Peeters

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